1988. En pleine effervescence du rock alternatif paraît l’album Mlah, des Négresses Vertes. Il s’ouvre sur La Valse à l’accordéon, suivi du fameux Zobi la mouche, manifeste post-punk du groupe. 2001, la tribu charismatique se sépare. 2018, le groupe qui a perdu Helno, auteur et chanteur disparu tragiquement en 1993, revient pour une grande tournée anniversaire : les 30 ans de Mlah !
En route avec Stéfane Mellino, guitariste et chanteur, qui a reformé le groupe pour cette série de concerts qui devraient enchanter les amateurs de rock alternatif festif.

Interview

Les Négresses Vertes sont-elles toujours aussi tapageuses et festives ?
Nous avons vieilli, bien entendu. Mais se retrouver autour de cet album qui nous a fondés, de toutes ses chansons, nous a régénérés, nous a emplis de cette énergie punk alternative de la fin des années 80 de Paris. L’album qui nous a fondés est en train de nous refonder.

Vous êtes à l’initiative de la reformation du groupe. Pourquoi cette décision ?
On avait tous gardé le contact. On se revoyait depuis quelques années. On avait envie de refaire quelque chose ensemble. Mais il nous fallait un prétexte suffisamment solide et refondateur. Nous ne voulions pas d’un retour en bois, un passage à la télé, et puis plus rien. C’est donc les 30 ans de notre premier album qui nous a décidés à reprendre la scène.

Qui sera sur scène ?
Cinq membres de l’équipe de départ, puisque Helno est décédé, et Mathias, à l’accordéon, a préféré ne pas reprendre ; il a choisi une autre vie. Il y a aura donc les deux frères Paulus, l’un à la basse et au chant, l’autre au trombone et au chant. Et aussi Iza Mellino, aux percussions, Miche, à la trompette, Cizzko à l’accordéon, Mathieu à la batterie, et moi, à la guitare et au chant.

Peut-on, en 2018, toujours définir votre musique comme du rock alternatif ?
Oui, et j’y tiens ! Car, quand on lit les textes des chansons, les mots sont toujours d’actualité. L’actualité de l’époque est devenue la réalité d’aujourd’hui. Prenons une chanson comme Il : je me souviens, c’était la fin des années Mitterrand et on disait : « Dans trois ans, il n’y aura plus de SDF. » On voit bien ce qu’il est advenu ! On dénonçait également les formes de racisme ou les intolérances religieuses. On voit ce que c’est devenu aujourd’hui ! Malheureusement, oui, c’est toujours du rock alternatif…

Vos morceaux sont toujours un hymne à la mixité…
Bien sûr ! Moi, je suis d’une famille de pieds-noirs, je suis arrivé d’Algérie à l’âge de 2 ans. En France, on est tous en provenance de quelque part. Ce qui est vraiment dommage pour notre pays, ce sont toutes ces formes de religions, de replis sur soi, de communautarismes… Je ne comprends pas pourquoi cela existe. Non, je ne comprends pas ! On est dans un pays libre, avec un niveau de vie privilégié par rapport au reste du monde. Il n’y a qu’à voir ailleurs. Bien sûr, il y a de la misère. Mais, en France, il y a aussi de l’entraide, les gens écoutent, s’aident. Je ne comprends pas pourquoi ce « chacun chez soi ».

Les Négresses sont donc toujours militantes ?
Oui, plus que jamais. Imaginez aujourd’hui, un groupe qui apparaîtrait et s’appellerait Les Négresses Vertes ! Il ne ferait pas deux pas dans la rue, il se ferait défoncer ! Nous aurions la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisimétisme NDLR) ou je ne sais qui sur le dos. À notre époque, les gens avaient compris qu’il s’agissait d’ironie, de dénoncer un état de fait, et non de diviser. C’était un pied de nez à toutes formes d’extrémisme. Mais notre tournée est une tournée plaisir. Celui de se retrouver entre nous, celui de retrouver le public. Et aussi celui de trouver les nouvelles générations que l’on a déjà croisées cet été, puisque la tournée a débuté en février.

Après la tournée, vous repartez pour 30 ans ?
Pour l’instant, aucun projet. Nous sommes sur cette tournée de plaisir, qui dure quasiment deux ans. C’est beaucoup de travail et de plaisir. Nous ne sommes pas dans cette optique de se dire : « On fait une tournée qui marche, puis on surfe sur le succès pour sortir un album. » Non, on se donne le temps. S’il y a des chansons nouvelles qui montent, de l’inspiration qui vient à nous, on laisse venir, bien entendu. Si ça ne vient pas, ce ne sera pas grave. On aura vécu ce plaisir-là. Et c’est déjà énorme. n

Concert le vendredi 9 novembre, à 20h30, à La Cigalière, parc Rayonnant, Sérignan.
Plus d’infos au 04 67 09 326 326 ou www.lacigaliere.fr – Tarifs : 30 € (assis), 24 € (debout), 28 € (privilège), 26 € (réduit), 13 € (pour les moins de 11 ans).