Éditorial 54

Par Fabrice Massé

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Va-t-on tester la production d’un urbanisme et de logements véritablement résilients ?

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Satisfaction

71 % de la surface de la Terre est recouverte d’eau (97 % d’eau salée et 3 % d’eau douce). On dit qu’il s’agit d’un élément ubiquitaire, c’est-à-dire présent partout, y compris sur d’autres planètes où on la recherche activement, car synonyme de vie. Autant dire que cette thématique aquatique nous concerne tous, habitants d’Occitanie ou non, de ses villes littorales ou de son arrière-pays. Et en cette période de canicule, ce focus estival est rafraîchissant à plus d’un titre.

Les enjeux sont certes considérables. Globaux, comme le changement climatique, ou plus locaux, comme les inondations, la submersion marine, les problèmes d’irrigation qui en découlent… Plus réjouissants aussi comme le rôle de cette ressource dans l’attractivité touristique de l’Occitanie, son impact économique, culturel…

Dans ce numéro d’artdeville est notamment observée la manière dont ces questions sont abordées ici par les pouvoirs publics. Et non sans une certaine satisfaction, disons-le. Dans son n° 4, il y a treize ans, chicxulub (ancêtre d’artdeville) portait son regard sur Gruissan et ses célèbres chalets sur pilotis, suggérant que les règlements d’urbanisme français d’alors feraient bien de s’inspirer de cette solution pour s’adapter au changement nécessaire, évoqué plus haut. Or, une expérimentation menée sous l’impulsion de la Région va bientôt démarrer, et sans doute à Gruissan, précisément (le choix de la ville n’est pas encore arrêté). Elle testera la possibilité de bâtir de nouveaux logements, non plus sur pilotis, mais flottants et écologiquement neutres ou, en tout cas, avec une empreinte écologique la plus réduite possible. Mais pourquoi pas positive ?

Car si « l’énergie positive » qui fonde désormais la politique régionale (également préconisée dans chicxulub n° 18 – Printemps 2008) ne manque pas d’audace, saura-t-elle pousser sa logique positiviste jusqu’au bout ? C’est-à-dire jusqu’à tester la production d’un urbanisme et de logements véritablement résilients ? Non seulement d’un point de vue énergétique, contre la submersion marine et les inondations, mais aussi vis-à-vis de la biodiversité (comme préconisé dans artdeville n° 41 – Automne 2013).

Si la loi Pompili, votée en juillet 2016, introduit bien les principes de « non-régression de la protection de l’environnement » ou « d’absence de perte nette de biodiversité », pour leurs projets d’aménagement, les décideurs doivent désormais simplement en tenir compte. Cela n’a rien de vraiment contraignant.

En attendant que Nicolas Hulot, désormais ministre d’État en charge de la Transition écologique, puisse convaincre de la nécessité d’améliorer cette loi, les maires, présidents d’Agglomérations, de Métropoles, en charge des plans locaux d’urbanisme, pourraient se montrer volontaires. Ils en ont les moyens. Cette expérimentation décidée par les pouvoirs publics d’Occitanie dans le Plan littoral 21 a donc une fonction pédagogique intéressante. Il faut se montrer démonstratif !

Plaçons la barre de la transition la plus haute possible, mobilisons les décideurs, constructeurs, pour en faire des témoins privilégiés, des acteurs, et concevons ensemble, en effet, des logements producteurs de biodiversité et non pas destructeurs. Puisque l’eau c’est la vie, avec ces quartiers flottants, jetons-nous à l’eau ! Pour une Région à biodiversité positive et à l’avant-garde.