Éditorial 67

Par Fabrice Massé

«

Ne quittons pas notre nouveau statut de sauveurs de la Planète

»

L’impact

Pour artdeville – éditions chicxulub, voir le ciel nous tomber sur la tête reste une sidération. Comme pour chacun, un temps de latence est nécessaire pour reprendre conscience, dresser un état (provisoire) des dégâts et tenter de s’adapter.

Certes, la chute d’une météorite, il y a 66 millions d’années, près de ce qui est désormais le paisible village mexicain Chicxulub, dans le Yucatán, n’a pas grand-chose à voir avec la pandémie que nous traversons. Le Covid-19 n’a pas anéanti les dinosaures et ni 70 % des espèces. Mais « un seul être vous manque et tout est dépeuplé », écrivait Lamartine. Or aujourd’hui, ce sont bien des centaines de milliers de morts que l’on pleure. Il s’agit de la déflagration économique mondiale la plus intense depuis la nuit des temps, alors que l’on vit la dernière extinction massive d’espèces.

Cependant… Ce confinement que nous nous imposons sur toute la planète métamorphose chacun de nous en sauveur. De vies humaines, mais pas que. Quoique puisse être catastrophique cette crise pour la plupart d’entre nous, nous ne pouvons que constater avec bonheur à quelle vitesse la nature reprend vigueur. Des biches dans les champs, des faisans au milieu des routes, des sangliers en ville, des baleines dans les calanques, le chant des oiseaux à nos fenêtres de citadins, en ce printemps renaissant… L’ensemble des écosystèmes terrestres, l’air que nous respirons, la réduction des accidents de la circulation sont autant de signaux positifs qui nous interpellent. Ce pourrait-il que, malgré le pire, le bilan global s’avère positif ?

À l’heure où nous bouclons ce numéro si spécial, le président Macron devrait annoncer la prolongation du confinement encore pour un mois. Si cela ne sidérera plus personne, cette décision accentuera d’autant l’impact sur notre mode de vie à court, moyen et long terme. Nous en serons les acteurs responsables et les témoins objectifs.

Mais alors qu’« il manque une pensée qui indique la voie, pose un diagnostic sur le monde et trouve une issue », comme l’analysait Edgar Morin (Midi Libre, dimanche 29 mars), pourquoi ne pas saisir l’extraordinaire opportunité de réflexion qui nous est offerte pour la concevoir ? Ce pourrait-il d’ailleurs que, cette fois, l’immense sociologue néomontpelliérain se trompe ? Les lecteurs du Monde notamment le savent : « Pour un nombre croissant de scientifiques, il ne fait aucun doute qu’il existe un lien étroit entre l’émergence de ces maladies et les dégâts causés à l’environnement. L’accroissement des impacts humains sur les écosystèmes expliquent l’augmentation des zoonoses, affirme Kate Jones, professeure d’écologie et de biodiversité à l’University College de Londres. » Ces scientifiques ne nous indiquent-ils pas déjà depuis de longues années la voie à suivre ?

Dans un contexte où toutes les certitudes sont revues, s’il en est une qui se trouve confortée, c’est bien celle-ci : quitter notre nouveau statut de sauveurs de la Planète serait tragique. Les crises à venir, nous le savons, en seront bien plus sévères. Bien d’autres médias relaient cette analyse. artdeville – éditions chicxulub fait sa part, autant que possible. Merci de partager plus que jamais ce numéro en ligne !

Note : artdeville paraît donc cette fois exclusivement par voie numérique ; sa diffusion dans les lieux publics étant désormais impossible. Une pensée solidaire aux structures culturelles qui, elles, n’ont pas eu la chance de pouvoir s’adapter. Les colonnes du prochain artdeville leur seront plus largement ouvertes.
Tous nos remerciements à la Région Occitanie Pyrénées Méditerranée et à Montpellier Méditerranée Métropole qui ont maintenu leur communication et nous ont permis de réaliser ce numéro. Les autres publicités ont été offertes aux annonceurs.