La Région Occitanie fait son cinéma, et ça lui va plutôt bien. Pour preuve, en 2016, les compteurs ont explosé avec l’accueil sur le territoire de 80 films (Fictions TV, longs métrages, documentaires, courts métrages). Soit 1 015 jours de tournage qui ont généré des retombées économiques, touristiques, sociales et culturelles importantes. Et l’année 2017 confirme la tendance. « La région connaît un trimestre historique, c’est du jamais vu », confirme Marin Rosensthiel, responsable de la commission du film à Languedoc-Roussillon Cinéma. Boosté de 17,5 %, le fonds d’aide de la Région devrait s’élever cette année à 3,7 M€, abondé d’un tiers par le CNC (Centre national de la cinématographie).

C’est arrivé près de chez vous
De Sète à Béziers en passant par Agde et Montpellier, quinze longs métrages, séries et courts métrages sont actuellement en tournage, parmi lesquels Le Poulain, premier film du réalisateur Mathieu Sapin avec Alexandra Lamy, Les Reptiles de Raymond Laguna, Tandem la série pour France 3 et, bien sûr, les nouveaux épisodes de la saison 6 de Candice Renoir, la série à succès de France 2. Depuis dix ans, la filière fiction TV connaît en région une progression exponentielle. L’implantation en 2015 à Montpellier d’une antenne régionale de TSF, opérateur majeur de l’industrie technique de tournage, est d’ailleurs un marqueur fort.
à elle seule, Candice Renoir génère plus de 3 M€ de retombées : emploi de techniciens, comédiens, figurants, nuitées d’hôtel, restauration… Démarrée en 2012, la série a été entièrement délocalisée à Sète. « Le charme et les décors naturels de la ville, l’ensoleillement, la facilité d’accès depuis Paris, les compétences audiovisuelles de la région (723 techniciens, 904 comédiens, source Films France) et la réactivité des institutions ont largement pesé dans la balance », confiait à l’occasion d’une conférence de presse Guillaume de Menthon, PDG de TelFrance. Au printemps dernier, la société de production a franchi un nouveau cap en construisant des studios de tournage – 1 600 m2 aménagés dans un ancien site d’embouteillage du groupe viticole Skalli – destinés à accueillir Demain nous appartient, la saga de TF1. Pour réaliser ces 30 épisodes, 200 techniciens, comédiens et figurants ont été sollicités quotidiennement. L’écriture de la seconde saison a déjà commencé mais le tournage reste à l’heure actuelle conditionné par les résultats d’audimat de la première saison.
De son côté, le groupe France Télévision a officialisé au début de l’été l’installation, à Vendargues, de studios de tournage (16 000 m2) pour les besoins d’un feuilleton quotidien. Le tournage devait démarrer début 2018 mais l’annonce officielle du gouvernement de baisser drastiquement les crédits alloués à l’audiovisuel public bouleverse le calendrier. Reste que le projet est intéressant à plus d’un titre puisque France TV a dans l’idée de recentraliser une partie de ses activités nationales sur Vendargues. Affaire(s) à suivre donc.

Les as de l’animation
Secteur particulièrement dynamique, l’industrie française du cinéma d‘animation surfe sur un marché porteur estimé à 84 Mds€ de revenus annuels et 1,3 million d’emplois. Historiquement, Toulouse et ses environs ont vu se développer des filières très conséquentes, à l’image de TAT Productions dont la série Les As de la jungle, diffusée sur France 4, a connu un succès phénoménal. À tel point que la société toulousaine vient de produire un long métrage tiré de la série qui est en voie de battre des records de fréquentations en salle (667 000 entrées en 10 semaines !). De leur côté, Xbo (Lâhmès et la grande dévoreuse, Boléro Paprika ), Anoki (Curse of the Flesh, Ibinou, Louison Diapason) ou Le-Lokal (Yalda) multiplient les créations documentaires et courts métrages d’animation de haute facture, régulièrement récompensés dans des festivals. À Montpellier, Dwarf Labs, qui compte 150 collaborateurs et fabrique entièrement des séries TV full CG pour Technicolor, enchaîne les commandes. Après Pirata et Capitano et Zou, le studio, qui développe ses propres projets de séries d’animation (Lune et le loup), vient de signer avec TF1 la coproduction de Monchhichi. Quant à la société Mad Films, dirigée par Jean Mach, elle a créé spécifiquement à Montpellier des studios pour produire la série d’animations Points de Repères diffusée sur Arte. Dans cette dynamique enclenchée, de nouveaux studios se créent, comme Les Fées Spéciales qui ont fait le pari d’une production alternative citoyenne, éthique et écologique. Le studio travaille actuellement sur le prochain long métrage de Michel Ocelot, Dilili à Paris.

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Les As de la jungle de TAT Productions. © DR

Un vivier de jeunes talents
Quid des écoles d’animation et effets spéciaux ? Là encore, depuis cinq ans, le réseau s’est développé, consolidé et démultiplié, dans les pas de ses deux locomotives : ArtFx et l’Esma (Ecole supérieure des métiers artistiques). Dans le top ten des dix meilleures écoles au monde, ces deux structures forment près de 2 500 étudiants par an (400 pour ArtFx et 2 000 à travers Icône, le réseau d’établissement fondé par l’Esma) et le projet de campus créatif de l’Esma, réalisé dans le cadre de la future « Cité Créative » de Montpellier, va encore modifier la donne. « Ce projet a vocation à devenir le plus grand pôle français de formation dans les métiers de la création et du numérique », affirme Karim Khenissi, DG de l’Esma. Livrable en 2020, ce campus de 16 000 m2 (37 M€) pourra accueillir 1 400 étudiants et intégrera trois écoles (Ipesaa design et jeux vidéo, ETPA photo, Cinecreatis cinéma). De plus, le campus bénéficiera d’un studio de 600 m2 (dédié entre autres à la motion capture), de 4 studios d’enregistrement professionnels, d’un fab Lab, d’une salle de cinéma et d’un espace d’exposition de 500 m2 ouvert aux créations numériques.
Dans le champ du cinéma, le cours Florent a ouvert en 2015 une antenne à Montpellier, l’ESAV à Toulouse est l’une des trois meilleures écoles publiques en France, et de nouvelles structures viennent de voir le jour : Travelling (cinéma et TV), Métamorphoses (maquillage), Ciné School.

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La cité créative de Montpellier

En parallèle, le renforcement des actions de médiation et d’éducation artistique autour du cinéma et de l’audiovisuel est l’un des axes forts du Pôle régional, créé depuis 1999 à l’initiative du CNC et soutenu par la DRAC : 23 000 lycéens et apprentis bénéficient chaque année du programme Lycées au cinéma (sources Bilan CNC et académies) dans le cadre des 223 établissements régionaux.
De son côté, Guillaume Boulangé, maître de conférences en études cinématographiques à l’université Paul Valery, milite pour créer des passerelles entre le monde universitaire et le milieu professionnel. « Mon objectif prioritaire est de faire en sorte que les étudiants aient une vision réelle du monde auquel ils aspirent, à la fois par le biais de stages au long cours mais aussi par l’accueil de professionnels à l’université. »

Coup de projecteur sur la diffusion
Indissociable de la création, la diffusion cinématographique, l’un des moteurs de l’activité, brille par son pluralisme. « À travers plusieurs missions internalisées au sein de LR cinéma, nous avons développé un outil efficace et performant qui nous permet de suivre un film de la première ligne d’écriture jusqu’à sa vie en salle », précise Karim Ghiyati, directeur de la structure montpelliéraine qui entretient des liens très forts avec les lieux de diffusion. Projections, avant-premières, festivals et rencontres (pas moins d’une quarantaine de manifestations en région dont Itinérances à Alès, Résistances à Foix, Sunsète, le mois du film documentaire…), débats en présence de réalisateurs… sont inhérents à l’existence même d’un film.
À l’occasion de sa 39e édition, le Festival Cinemed présidé par Aurélie Filipetti, ex-ministre de la Culture, a présenté dans son palmarès plusieurs films tournés en région, dont Le Semeur de Marine Francene, Tout nous sépare de Thierry Klifa avec Nekfeu, Catherine Deneuve et Diane Kruger, ou encore Cornélius, le meunier hurlant de Yann Le Quellec qui sortira sur les écrans en avril 2018. Intégralement filmé à Sète, Montpellier et Agde, Mektoub My Love, le dernier film de Abdellatif Kechiche, a été sélectionné en compétition à la Mostra de Venise 2017. Une belle visibilité pour l’Occitanie qui compte 209 établissements cinématographiques et 143 classés Art et Essai (sources Bilan CNC 2016) avec une fréquentation des salles en progression de 4,3 %, soit 17,7 M d’entrées.
Si tous les marqueurs sont au vert – la croissance de l’emploi dans la filière audiovisuelle et cinématographique est plus forte en Région qu’au niveau national –, il n’en reste pas moins vrai que l’industrie audiovisuelle reste intrinsèquement liée aux financements.
À la tête des Studios d’Occitanie, SAS créée en juin dernier à Pézenas, Bruno Granja ambitionne de réaliser, au Domaine de Bayssan à Béziers, un ensemble dédié au cinéma. L’annonce de ce projet de parc à thème intégrant studios professionnels, lieux de tournage, musée, centre de formation… atteste d’un engouement fort pour la filière cinéma. Clap de fin.

artdeville remercie Kharim Ghiyati et Marin Rosensthiel à Languedoc-Roussillon Cinéma pour leur coopération.

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